Cette est une invitation à partager des découvertes, à réfléchir sur un sujet, à témoigner de travaux artistiques qui sont en lien avec mes recherches, etc.

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Julio Le Parc, ne te tais pas !

Expositions – Publications / janvier 2018
Sois artiste et tais-toi
Edition Exil – Décembre 2017

Son nom vous dira peut-être quelque chose en rapport avec l’art cinétique ou l’Op’art… Mais ce serait réduire considérablement sa vie, son œuvre tant son travail de recherche fut intense…sur des thématiques qui m’intéressent plus que jamais. Né en argentine en 1928, Monsieur Le Parc a 90 ans et les fête avec un livre au titre déroutant « Sois artiste et tais-toi ». Or c’est bien ce qu’il ne fait pas ! Ce livre reprend les croquis, les photos de ses œuvres et de ses amitiés artistiques, mais surtout les nombreux textes politiques, poétiques, et théoriques qu’il écrivit entre 1957 et 2017. Il fut un des membres très actifs du GRAV (Groupement d’Art Visuel) dans les années 60, groupement fondé pour briser l’isolement des artistes, chercher la confrontation, partager l’aventure de la recherche, tenter le travail collectif, etc. Ce groupe proposait des expériences visuelles situées sur le plan physiologique et non émotif, et invitait à démystifier le phénomène artistique. Aujourd’hui, il ressort de l’oubli pour des positions écrites « Assez de mystifications » en 1961 et 63, « Propositions générales » en 1961, et pour des réalisations collectives « Labyrinthes », « Salle de jeux », « Sortie dans la rue », etc.) Le GRAV fut dissout en 1968, Julio Le Parc cessa de s’intéresser à l’art cinétique et persévèrera dans son travail artistique, la recherche du dialogue, du travail collectif, de la lutte contre une certaine idéologie liée à l’art, et dans la recherche du potentiel d’action et de créativité des gens. Il crû, et croit encore, à la fonction sociale de l’art contemporain, et le défend dans chaque texte. Mais, comme l’écrit si bien Colette Lambrichs en préface, « Qui pouvait prévoir alors que l’individualisme allait être exalté comme jamais, et que la plupart des artistes participeraient à cette mise en concurrence, chacun avec son image de marque, dans des rapports de force régis par le marché… ».

Pourquoi ?

Témoignages / novembre 2017

Pourquoi mon travail artistique se concentre t’il depuis 8 ans sur l’art participatif ?

Des désirs et des prises de conscience…

Je désire aller à la rencontre des autres dans ma démarche artistique, d’inviter le public à participer à une œuvre qui ait du sens…Et j’ai ce besoin primitif de garder trace, et de penser que ce besoin peut être partagé : la trace de ses sentiments, de son passage, de sa vie,

Et puis, il y a de petits signes de l’univers, et des « regards croisés »…

> La sculpture en ciment démolie :

En 2008, j’obtenais l’autorisation de la ville de Vanves de placer une sculpture en ciment de 2 m de haut, représentant une femme les bras levés, à proximité du périphérique. Elle fut démolie à la barre de fer dès le deuxième jour. Une sculpture imposée sur certains territoires n’a pas sa place sans un minimum de concertation…

> Le Pollock en herbe et en eau :

Parc André Citroën, je remarque un jour un jeune garçon qui prend de l’eau dans un seau et la jette sur de vastes murs de marbre en faisant de grands gestes formant des traits et dessins étonnants. Ils disparaissent rapidement asséchés par la puissance du soleil. Pourtant, la maman l’interrompt en lui disant que c’est n’importe quoi. J’ai alors regardé cette scène, fascinée, en me disant que ce gamin avait instinctivement exprimé sa créativité, et qu’elle était étouffée aussitôt…

> L’invitation à une aventure artistique :

Pour le nouvel an en 2010, j’invitai 120 personne par mail à faire un trou, un vide ou une ouverture dans une feuille de format A5 et à écrire un mot dessus. Je reçu 47 contributions dans ma boite aux lettres avec des feuilles toutes plus créatives les unes que les autres. Le besoin d’expression créative des personnes quelques soient leur âge et leur milieu social fut une révélation.

C’est ainsi qu’est né Œuvre ensemble : une invitation à une expression personnelle qui ouvre un accès à chacun vers sa créativité et qui permet de participer à une œuvre composite. J’en dessine les grandes lignes telle une chorégraphe ou un chef d’orchestre.

Depuis 8 ans, je multiplie ces recherches artistiques auprès des publics, continue d’interroger la question du participatif, et chaque fois je m’étonne de l’accueil du public, et du sens que prend l’oeuvre au fil de sa transformation.

Tant que cet étonnement restera vivace, je poursuivrai ce travail artistique, à la rencontre des expressions artistiques et créatives des autres et de la mienne.

Véronique Le Mouël – Novembre 2017

Réenchanter le Havre, un défi réussi !

Colloques, manifestations, rencontres / août 2017

Un été au Havre, c’est un joli parcours proposé par Jean Blaise, directeur artistique, et son équipe pour découvrir le Havre avec le regard gourmand de la découverte.

Inscrite au patrimoine mondial de l’humanité, le Havre séduit les artistes depuis longtemps et, il est vrai, y règne une ambiance particulière.

Entre l’activité portuaire, impressionnante porte sur le monde, et le style architectural typique d’Auguste Perret qui a tracé de larges avenues et laissé une empreinte architecturale forte, il y règne l’ ambiance d’une modernité industrielle qui semble bien froide et grise sous les nuages. Quand la lumière fait resplendir les couleurs des 12 768 verres colorés de l’église Saint Joseph sur les murs de béton imaginés par Perret, que l’oeuvre de Chiharu Shiota y semble en lévitation, et qu’au détour d’une avenue se profilent une arche de containers de Vincent Canivet ou une structure blanche et ouverte sur la mer comme une porte à plusieurs ouvertures de Sabina Lang et Daniel Baumann, vient alors le plaisir de se laisser surprendre.

Les panneaux de signalisation qui dialoguent avec vous (« Alors c’était bien ? », «  Tournez la tête ») sont bien à propos, et il faut aussi pousser les portes pour découvrir quelques pépites, comme le travail de Stéphane Thidet au Portique, centre régional d’art contemporain. Sa recherche d’expression de la tension entre puissance et fragilité m’a profondément séduite.

L’art participatif y a sa place, avec un temple aux 5000 voeux dont la mise en scène, réalisée par une compagnie La Bazooka, me parait très discutable. Il y manque une ligne forte, et on se sent un peu trimballé avec nos gilets de sauvetage pour rejoindre l’îlot au milieu du bassin…Tandis que le geste de faire bouger l’immense ballon transparent, hérissé de fusains pour créer l’oeuvre collective sur les murs de la salle  par la trace laissée, me semble plus artistique et poétique. Une oeuvre de Karina Smigla-Bobinsky à voir à la Smart Factory au Fort.

S’il n’est pas toujours simple de bien suivre les parcours (la signalétique est discrète !), le réenchantement est plutôt réussi !

Véronique Le Mouël

Culture et développement durable

Colloques, manifestations, rencontres / mars 2017

Rencontre Culture et développement durable organisée par le Ministère de la culture et de la communication – Vendredi 10 mars 2017

De la place de l’art dans ces rencontres.

Dans ce lieu magnifique qu’est le Palais de la Porte Dorée, des prises de paroles se succèdent avec les mêmes leitmotivs : changer nos comportements de consommateurs et moins gaspiller, c’est être conscient des enjeux pour notre planète, pour nous et pour nos enfants, accepter la diversité de nos cultures, défendre la parité, c’est reconnaitre la valeur de chaque être humain et offrir la possibilité d’une juste place pour chacun. Au-delà de ces bonnes intentions, ce qui m’a frappé, c’est le réalisme. Chaque direction, chaque entité du ministère propose des solutions, donne des exemples de mesures prises, sans glorification, et en faisant référence à la légende du colibri. Chaque goutte d’eau compte pour éteindre le feu.

Et l’art dans cette mise en mouvement général ?

Au terme des témoignages du directeur du Théâtre national Chaillot et chorégraphe, Didier Deschamps, d’une commissaire d’exposition, Lauranne Germond (Coal), et des architectes qui expérimentent le recyclage et le réemploi des matériaux, l’art le moins consommateur d’énergie est sans aucun doute la danse ! Et les créateurs d’autres disciplines cherchent de nouvelles voies : les architectes explorent de nouvelles formes architecturales avec des matériaux de récupération, les artistes plasticiens explorent par différentes expressions les notions de transformation et de disparition.

Force est de constater que les artistes cherchent moins à proposer un futur rêvé qu’à dénoncer les dangers à venir… Par exemple, dans son projet appelé Zone bleue, Stéfane Perraud souhaite rendre perceptible pour les générations futures des lieux où sont enfouis des déchets radioactifs (site : www.stefane-perraud.fr). L’art de notre époque est moins dans la recherche d’un style que celui de moyens d’expression pour alerter ceux qui nous suivront…

Véronique Le Mouël

Qu’est ce que le progrès ? Tino Sehgal au Palais de Tokyo

Expositions – Publications / novembre 2016

A la Sorbonne, Place du Panthéon

Carte Blanche à Tino Sehgal

Pourquoi fait-on la queue ? Après avoir acheter son billet d’entrée du Palais de Tokyo et traverser le rideau de perles, telle est la question. Quand, enfin, un enfant vient vous chercher pour vous entrainer dans un Palais de Tokyo vidé de toute oeuvre, ce n’est plus nous qui posons la question mais lui, l’enfant. « Qu’est ce que le progrès ?  » La conversation s’engage et je me demande alors si nous ne sommes pas sur la planète du Petit Prince…Entrainés dans une ballade malgré nous par des personnes de différents générations, la conversation se poursuit dans différents espaces du Musée, emplit de gens qui marchent, dansent et produisent des sons bizarres. Il faut avoir envie de s’aventurer hors de sa zone de confort pour découvrir une pièce toute noire dans laquelle on finit par pénétrer attirés par des voix étranges, ou pour se retrouver dans une salle ronde avec deux enfants qui jouent une scènette sur le futur. Ce sont des « situations construites » selon Tino Sehgal, l’artiste qui a eu carte blanche pour occuper le Palais de Tokyo pendant 2 mois. Né en 1976, il a étudié l’art conceptuel et la danse, En 2010, je me souviens d’avoir été intriguée, de loin grâce à des articles de presse, par cette oeuvre qu’il proposait pour la première fois au Musée Guggenheim de New York. Il a représenté l’Allemagne à la Biennale de Venise et reçu plusieurs prix prestigieux. Au Palais de Tokyo, il réalise une oeuvre inclassable et touchante qui m’a enchanté… Véronique Le Mouël

La gravure et la céramique aujourd’hui selon Evelyne Henrard

Diner ensemble / novembre 2016

5 novembre – Diner ensemble #12

Evelyne Henrard articule son travail autour de la question des savoir-faire liés au médium traditionnel et confrontés aux démarches artistiques actuelles. Elle modèle le grès enduit de porcelaine cuit à haute température, travaille la gravure à l’eau forte sur différents médiums tels que le zinc, le bois ou le lino, utilise le fusain ou le dessin sur de très grands formats de papier. Son regard et ses techniques rendent saisissants certains aspects du monde végétal et animal. Et elle s’interroge et nous questionne…

La peinture prend du volume selon Anne Damesin

Diner ensemble / avril 2016

Brouillon auto

13 avril – Diner ensemble #11

Anne Damesin est artiste plasticienne. Elle travaille sur la relation à l’autre. Ses propositions formelles s’articulent autour de la notion de la ligne et de la trace. Les lignes deviennent maillage, liens tissés dans un flux plus ou moins dense. Les ronds prolifèrent comme un tissu organique, une matière vivante. Ses supports de prédilection sont la toile, le papier et aussi l’installation.

Que nous dit le mot Fraternité ici et maintenant, et que m’évoque t’il en tant qu’artiste ?

Témoignages / avril 2016

Que reste t’il de l’esprit du 11 janvier 2014 ? Y a t’il une alternative à la peur et à la logique sécuritaire ?

Telle est la question que pose Patrick Viveret, philosophe et magistrat, et qui nous invite à mieux connaître ce mot qui apparut aux cotés de Liberté et Egalité dans la devise républicaine de la 1ère république en 1848. Jugé comme trop évocateur de sentiment à certaines époques, il subsista malgré tout, et fait encore partie de la devise qui nous unit en France.

L’auteur nous explique en quelques pages l’histoire et la valeur de ce mot si nécessaire aujourd’hui, tout comme d’autres mots essentiels à notre époque tourmentée. Est-ce utopique d’imaginer une citoyenneté terrienne qui porte en germe l’esprit de fraternité présent dans la Déclaration universelle des droits de l’homme ? Patrick Viveret propose que la France renoue avec son génie propre qui est de penser son rapport à l’universel, au genre humain, au frater.

Les mouvements de citoyenneté fraternelle pour mieux réagir à la violence et au vide politique actuels illustrent des tentatives de chemin différent.

Sommes nous loin de la question de l’art ? De mon point de vue, quand il s’agit de changer le regard sur le monde, nous n’en sommes jamais loin.  Avec une vraie envie de partage, l’idée que nous avons de l’art se transforme peu à peu. J’aspire à y contribuer. Véronique Le Mouël

Fraternité, j’écris ton nom – Patrick Viveret – Edition Les Liens qui Libèrent, 2015, Paris

Et aussi : Le bonheur en marche – Patrick Viveret – Mathieu Baudin – Edition Guérin – Chamonix 2015

Penser le changement climatique avec des chercheurs et des artistes

Témoignages / novembre 2015

Orta Climat 2015 

L’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a organisé du 20 au 30 octobre 2015 une « semaine durable » durant laquelle artistes et chercheurs ont partagé leurs réflexions sur l’évolution de nos sociétés dans le contexte du changement climatique.

« Au delà des constats et des diagnostics climatiques, il y a une dimension sensible que se joue, un état d’esprit, un appel à réaliser ce à quoi plus personne ne croit….Les mutations sociales et climatiques transforment radicalement le monde des imaginaires, à commencer par celui des artistes….Le passage d’un art ethnocentrique à un art au service des causes du monde, de la cause commune s’accélère.…Les pratiques artistiques entendent aujourd’hui incarner une certaine idée du changement par une pratique artistique du lien. »

Ces quelques lignes sont écrites par Yann Toma et proviennent du recueil qui témoigne du contenu de ces rencontres entre chercheurs et artistes, et propose de croiser les points de vue de différentes disciplines : philosophie, économie, mathématiques, géographie, etc. Yann Toma est artiste, professeur d’art plastique et directeur de la ligne de recherche Art&Flux. Il est aussi le commissaire de cette exposition à la Sorbonne, présentant des œuvres de Lucy+Jorge Orta, d’Olga Kisseleva, d’Olafur Eliasson, de Wen Fang, Barbara Portailler, etc.

Parmi les découvertes réjouissantes de nouvelles expressions et formes artistiques, j’ai reçu mon passeport de membre de la communauté Antartique Mondiale. Lucy+Jorge Orta sont les artistes à l’initiative de cette communauté qui grandit au fil des expositions. Un médiateur vous reçoit à un bureau étonnant, et fait part des valeurs d’entraide pour ce continent au climat extrême avant de tamponner votre passeport et de vous enregistrer.

Ainsi se déploie des œuvres qui témoignent d’un art vecteur de lien social, une activité qui appelle l’imaginaire de tous et invite à de nouveaux modes de pensée.

L’installation que j’ai imaginé et qui porte le nom « Œuvre ensemble pour le climat » s’inscrit dans cette mouvance. Véronique Le Mouël

Décollages artistiques à la Fondation Cartier et celle de Vuitton

Expositions – Publications / février 2015

Olafur Eliasson                                Diller Scofidio + Renfro« Contact » d’Olafur Eliasson et « Musings on a glass box» des architectes Diller Scofidio + Renfro sont deux expositions, si le mot exposition peut avoir encore un sens, à voir en ce moment en février 2015 à Paris dans deux fondations, celle de Cartier (30 ans) et celle de Vuitton (3 mois).

L’une comme l’autre invitent davantage à vivre des expériences qu’à regarder des œuvres : expériences du corps et des sens, dans des espaces conçus pour les mettre à l’épreuve. Rien d’éprouvant cependant, mais notre rapport au bâtiment de Jean Nouvel est soudain dérouté par une fausse vraie fuite d’eau après laquelle un seau se déplace pour en attraper les gouttes qui tombent du plafond situé 8 mètres plus haut.

Pendant que notre attention est mobilisée par ce seau à roulettes, les grandes surfaces vitrées de la fondation s’opacifient progressivement au point que le bâtiment semble se refermer sur lui-même. Dans une autre salle, nous découvrons un écran situé à l’horizontale à quelques centimètres du sol, et là, surprise si on prend le temps de s’allonger et de comprendre.

Notre rapport à l’espace et à notre déplacement est interrogé d’une autre façon par Olafur Eliasson dans l’installation « Contact » qui se termine le 22 février prochain à la Fondation Louis Vuitton. Il nous propose une visite au cœur d’une sorte de kaléidoscope à plusieurs facettes, car chaque salle est une facette proposée par celui qui nous invite à perdre nos repères. Notre image est reflétée, dupliquée, et parfois l’espace autour, au point de la rendre fugace et infinie.

Où sommes nous, qui sommes nous, quelle est notre place dans ces espaces métaphoriques. Est ce un voyage initiatique ? Le spectateur est plus que jamais dans l’œuvre, passager ou pilote, c’est selon chacun.

Quand la lumière flash vient éclairer telle un trombinoscope la source d’eau qui jaillit dans le noir, nos yeux cherchent à saisir la forme qui s’inscrit sur nos rétines car ce sont chaque fois des des œuvres sculpturales qui apparaissent, et disparaissent tout aussitôt.

Emerveillement et/ou prise de conscience : dans un espace indéfini, l’objet sculpté dématérialisé, est insaisissable tant dans la matière que dans la forme, il ne peut être saisi que par le regard…

Véronique Le Mouël