L’art dans la ville, l’art participatif : s’interroger, partager et revenir sur des projets menés par l’association Œuvre participative que j’ai fondé en 2010
Billet 4 – 8 mars 2024
« Pause sensible » sur la dalle du périphérique parisien en 2013
Sur la surface de bitume en friche, à la hauteur du boulevard Adolphe Pinard à Malakoff, un jeune homme a posé un rond de moquette bleue sur le bitume, s’est placé debout dessus, et s’est mis à jouer du trombone. D’autres personnes ont apporté leur morceau découpé dans ce même matériau, et chacun a improvisé un mouvement selon son envie : la petite fille a fait la roue sur sa silhouette découpée, le couple s’est enlacé après avoir disposé, l’une un arbre fleur, l’autre un oiseau, une jeune femme s’est assise à côté d’une forme abstraite composée de plusieurs morceaux bleus, etc.
En ce jour d’avril 2013, que s’est il passé pour qu’une mosaïque de moquette bleue se constitue de façon poétique sur ce lieu inhospitalier, avec des personnes qui semblent joyeuses de ce moment ?
J’expérimente une nouvelle invitation à créer. Elle a été pensée après d’autres tentatives de réaliser une œuvre sculpturale sur ce lieu de jonction entre Paris et sa banlieue, avec les habitants du quatorzième, de Malakoff et de Vanves
En cet après-midi de printemps encore un peu trop gris et froid, je pose mes grands lés de moquette d’un bleu profond à même le trottoir et attend le passant.
Mon invitation à créer dans la moquette se formule ainsi :
Une petite surface de créativité pour un grand espace commun, ce serait :
une étoile…un tapis volant…
une île…une petite planète…
un carré rond…une pièce de
puzzle……une ponctuation… ?
Une personne puis deux, puis trois amorcent l’action en se mettant à quatre pattes, munies d’une craie blanche et d’une grande paire de ciseau de très bonne qualité. Elles découpent des formes assez généreuses et les posent sur l’esplanade. Des discussions, des échanges sont provoqués par ce moment surprenant et réjouissant.
Un instant le temps semble suspendu. Pour moi en tous les cas. Je ressens avec émotion la créativité spontanée de passants dont j’ignore tout, je vois une œuvre au sol se former, j’imagine déjà ce même projet avec plus de monde et dans des lieux inattendus, à la périphérie, à la limite de l’art, des arts, la danse, la musique, les arts plastiques, l’écriture.
Véronique Le Mouël